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La marine de L'union (1)

Publié le par Olivier Millet

La marine Nordiste durant la guerre de sécession domina largement le conflit par sa taille et l'absence de réelle opposition de la part de la marine confédérée. La marine de l'Union en 1861 qui n'est rien de moins que l'US Navy moins quelques marins et officiers qui ont préféré rejoindre le Sud, possédait 42 navires à voile et à vapeur ; à la fin de l'année 1861 elle réussit à tripler ses effectifs. En 1862 on comptait presque 390 unités. Le budget de la marine fut multiplié par 10 pour atteindre les 120 millions de dollars. Trop méconnu, le rôle de la marine de l'Union dans la guerre fut déterminant. A l'issue du conflit, l'US Navy n'était ni plus ni moins que la plus grande flotte de guerre du monde juste derrière la Royal Navy mais était bien plus moderne et possédait un grand nombre de navires cuirassés. A la fin de la guerre l'ensemble des unités composant la flotte de l'Union atteignait les 671 unités dont 75 cuirassés.

Une petite marine

A l'origine le seul ennemi potentiel de l'US NAVY fut la marine anglaise qui avait déjà douloureusement croisé sa route en 1812. La vulnérabilité des côtes des États-Unis et l'incapacité de sa flotte d'alors à contrer les attaques de la Royal Navy avaient fait prendre conscience à Washington et à ses amiraux de la nécessité de posséder une flotte digne de ce nom et d'un système de fortifications côtières beaucoup plus dense. Durant la guerre du Mexique l'US Navy n'eut pas à combattre de navire de guerre et sa seule contribution à des opérations militaires durant le 19ème siècle, hormis la guerre de 1812, fut le conflit avec les barbaresques et les opérations anti-négriers sur la côte sud-africaine. Les missions de la marine dans les années 1840, 1850 sont essentiellement du contrôle de trafic, la lutte anti-piraterie et les missions scientifiques. L'US Navy est également intervenue au Japon pour forcer ce pays à ouvrir ses portes au marché international par l'entremise d'une flotte commandée par le Commodore Matthew Perry en 1853. D'une manière générale, la marine de guerre américaine n'est pas une force de première importance, elle est incapable d'affronter les grandes escadres européennes comme celles de la France ou de l'Angleterre et en outre sa mission première ne la destine pas à autre chose que la protection des intérêts américains sur ses côtes ou à l'étranger.

Lorsque la guerre civile éclate, la marine de l'union possède relativement peu de bateaux dont certains sont en chantier pour réparation et d'autres envoyés à l'autre bout du monde. Seule une quarantaine est réellement disponible parmi lesquels 27 sont en missions lointaines.

La mission que le président Lincoln allait lui donner était multiple :

assurer un blocus des ports confédérés afin de paralyser le Sud et de le priver d'une de ses importantes ressources en armements et matières premières de la même manière que durant la guerre contre le Mexique. Ce genre de mission pour être remplie efficacement nécessitait un grand nombre de navires pour assurer une permanence au large des nombreux ports sudistes.

La mission suivante fut une réelle innovation. La flotte devait emprunter les accès fluviaux pour porter la guerre au cœur du Sud en transportant des troupes ou en attaquant directement les villes et forces ennemies stationnées en bordure de fleuve. La flotte de haute mer devait se muer en flottille de rivière.

Bien entendu les missions d'escorte, de liaison et de combat en haute mer devaient également être assurées. Tout navire de guerre ou corsaire sudiste aperçu en mer devrait être combattu.

Des flottes en pleine mutation

En ce milieu du 19ème siècle, les marines du monde étaient en pleine mutation, la propulsion à vapeur remplaçait la propulsion à voile, lui conférant l'avantage de la vitesse et surtout de ne plus se soucier de la direction du vent pour se déplacer. Les canons rayés équipaient les ponts des navires de guerre améliorant la précision des tirs. Cette double révolution avait en partie échappé aux Américains qui n'ont pas su prendre en compte des enseignements à tirer des batailles navales Russo-Turques et la guerre de Crimée. Lors de la bataille navale de Sinope entre Russes et Turcs, les canons à obus explosif réduisirent en miettes les navires de bois des Ottomans. De la même manière les barges blindées de fer des Français lors de la guerre de Crimée, écrasèrent les défenses russes lors de la bataille de Kinburn. Ces barges surmontées de plaques de fer reçurent plus de 200 impacts en retour mais aucune ne fut sérieusement endommagée. Les canons rayés à obus explosif pouvaient ainsi mettre en pièces les navires de bois et seuls des navires protégés par des cuirasses en fer pouvaient résister à cette nouvelle artillerie embarquée. Seulement la marine américaine était pourvue de nombreux navires à propulsion à voile et vapeur mais à coque en bois classique.

Les marines française et anglaise avaient chacune lancé leur propre navire à cuirasse de fer en 1858, les croiseurs Gloire et HMS Warrior, mais ces navires étaient des vaisseaux à flancs protégés avec une mâture classique et pas de véritables cuirassés à vapeur dépourvus de voiles. Sur ce point l'US Navy se montrera particulièrement novatrice avec des vaisseaux blindés, sans voiles, à faible tirant d'eau et à tourelles uniques ou multiples pouvant effectuer des rotations à 360°. Mais au début de 1861, aux États-Unis on était encore loin de se soucier de mettre au point de telles innovations technologiques. Devant l'absence d'ennemis réels, les projets farfelus de navires cuirassés d'un certain Ericson n'avaient pas retenu l'attention. La guerre qui s'annonçait allait tout changer. Seul le Monitor, premier navire cuirassé de l'union, avait été mis en chantier au début du conflit suite à des rumeurs sur l'existence de navires cuirassés sudistes. Dès 1862, l'US Navy est la marine ayant les navires les plus modernes et les plus efficaces au combat du monde. Dès 1862 L'Angleterre, en froid avec les États-Unis, suite à l'affaire du Trent, réalise qu'elle ne pourra sans doute pas s'approcher des ports américains, en cas de conflit, sans subir de dommages sérieux et sans pouvoir répondre efficacement. Lors de la bataille d'Hampton Roads, ce sont toutes les marines du monde qui se sont retrouvées obsolètes. La fièvre du Monitor qui suivit, fit que l'US Navy lança un programme d'armement naval dans le domaine des cuirassés sans précédent, même sur les fleuves comme le Mississippi. Des navires cuirassés à très faible tirant d'eau furent construits pour progresser et soutenir les armées d'invasion nordistes. La flotte en "eau boueuse" ou brown fleet était née, Pour la première fois dans l'histoire une flotte de combat était spécialement étudiée et mise en chantier dans le seul but de combattre sur les cours d'eau.

Dans le domaine naval, Sud et Nord se lancèrent dans la guerre sous-marine avec d'un côté le célèbre CSS Hunley et de l'autre le USS Aligator. Bien qu'anecdotique cette nouvelle forme de combat fut le commencement d'une nouvelle ère pour toutes les grandes flottes du monde, la mer prenait dès lors avec le succès du CSS Hunley, une nouvelle dimension, le combat sous la surface.

de gauche à droite, la frégate à vapeur Kearsarge, célèbre pour avoir vaincu le corsaire sudiste CSS ALABAMA en 1864, le Keokuk et ses deux superstructures abritant un canon pivotant, la canonnière de rivière USS Onondagade gauche à droite, la frégate à vapeur Kearsarge, célèbre pour avoir vaincu le corsaire sudiste CSS ALABAMA en 1864, le Keokuk et ses deux superstructures abritant un canon pivotant, la canonnière de rivière USS Onondagade gauche à droite, la frégate à vapeur Kearsarge, célèbre pour avoir vaincu le corsaire sudiste CSS ALABAMA en 1864, le Keokuk et ses deux superstructures abritant un canon pivotant, la canonnière de rivière USS Onondaga

de gauche à droite, la frégate à vapeur Kearsarge, célèbre pour avoir vaincu le corsaire sudiste CSS ALABAMA en 1864, le Keokuk et ses deux superstructures abritant un canon pivotant, la canonnière de rivière USS Onondaga

Les navires de guerre et les marins de l'Union :

La flotte de l'Union au début du conflit était composée de frégates de ligne, de plus petits navires rapides propres à la lutte contre les pirates et dans un premier temps d'un ensemble hétéroclite de navires civils armés en urgence pour faire face au conflit. Les équipages ont un effectif en 1861 d'environ 9000 hommes, Lincoln dut faire un appel aux volontaires pour en recruter 18000 de plus. On estime à plus de 84000 hommes les effectifs de la marine de l'Union à la fin du conflit. A l'issue de la guerre plus de 4523 marins et officiers de l'US Navy furent tués ou moururent des suites de maladies, 1710 furent blessés.

Dans les années 1840, les futurs officiers étaient embarqués sur des navires comme enseignes et apprenaient les rudiments de leur métier sur le tas. Ce n'est qu'à partir de 1845 qu'une véritable école pour les officiers de marine fut créée afin d'apporter les connaissances de base de la navigation, du combat d'artillerie, et une culture générale et de la discipline qui manquaient cruellement. Ces académies navales comme celle d'Annapolis dans le Maryland ne suffisaient pas à fournir un nombre suffisant d'officiers et l'intégration des cadets se doublait d'une formation sur les navires directement. Chaque marin recevait une solde en fonction de son grade et de son expérience : un marin vétéran avait droit à une paye de 18 dollars ce qui était supérieur à ce que touchait un soldat de l'armée de terre, les plus novices entre 8 et 12 dollars. Les officiers possèdent les grades de lieutenant (capitaine) captain (commandant) et Commodore quand il s'agit de commander une escadre. En 1861 Il n y a pas d'amiraux dans l'US Navy, ce grade sera officiellement créé sur décision du Congrès en 1862 pour récompenser mais aussi hiérarchiser le commandement naval suite à la forte augmentation des effectifs. Le commandement de la marine de l'Union était de la responsabilité du secrétaire à la marine GIdeons Welles et des amiraux Vahlgreen, Dupont, Porter, Farragut, foote. Le ministère de la marine était en outre composé de 11 départements parmi lesquels celui du recrutement, la construction navale, l'administration, l'artillerie embarquée et navale, l'approvisionnement, les cartes, le service de santé naval, les US Marines, les arsenaux et les ports ou encore celui de la propulsion. La marine possédait ses propres hôpitaux au nombre de 8, ses arsenaux, et fut la première au monde à mettre sur pied des navires hôpitaux comme le USS Rover. Originellement l'US Navy est divisée en 6 escadres, une pour la défense des côtes américaines (home squadron) une en Afrique, une en Amérique du Sud, une dans le Pacifique, une en Méditerranée et une dans les Caraïbes. Pour les besoins du blocus une nouvelle organisation à 4 escadres plus une cinquième chargée du combat fluvial fut mise en place.

Contrairement au Sud, le Nord était bien pourvu en chantiers navals et en cales sèches, il put ainsi construire plus facilement de nouveaux navires de guerre et son industrie lourde lui permit en outre de faciliter la construction des Ironclads très gourmands en fer. On estime à plus de 200, le nombre de navires construits par la dizaine de chantiers navals nordistes durant la guerre et à plus de 400 les navires achetés à l'étranger. La politique d'utilisation de vapeurs civils désarmés afin de les transformer en canonnières permit d'éviter un effort de construction plus important et de pallier temporairement au manque chronique de bateaux en début de conflit. Cette solution sera également appliquée par la marine confédérée encore plus mal lotie. Fin 1861, L'US Navy possédait 260 navires de guerre soit 4 fois plus qu'au début du conflit. A la fin de la guerre l'US Navy alignait 671 bateaux soit 15 fois plus qu'au début, la majorité d'entre eux une fois la guerre terminée seront revendus, ferraillés ou démontés, renvoyés dans la flotte marchande.

Mais durant le conflit des navires bien plus modernes furent lancés comme le croiseur USS Galena à coque en bois recouverte de plaques d'acier qui déplaçait 950 tonneaux sur 50 mètres de long et avait un armement très puissant de 4 pièces de 9 pouces (soit 230mm) et deux canons Parrot de 100 livres. Le navire était propulsé par une machine à vapeur à la vitesse de 8 noeuds. Autre navire au design très innovant, le USS Keokuc à deux châteaux dans lesquels se trouvaient des embrasures pour les canons qui pouvaient faire croire qu'il s'agissait de tourelles. En fait l'armement se composait de seulement deux canons pivotant pouvant tirer depuis différents angles depuis le navire. Ce dernier était aussi cuirassé de fer, propulsé par vapeur et pesait 700 tonnes pour une longueur de 50 mètres.

L'USS Onondaga était un monitor de fer à deux tourelles pesant 1250 tonnes se déplaçant jusqu’à 7 noeuds et possédant un armement de deux canons de 15 pouces soit 381mm, (le calibre des canons du cuirassé allemand de la seconde guerre mondiale BIsmarck) et deux canons de 150 livres à âme lisse Dahlgreen. Mais le plus étrange de tous fut le USS Alligator, un sous-marin, le premier de la marine américaine, de 15 mètres de long jaugeant 250 tonnes et armé de mines.

Jamais aucune marine dans le monde n'avait entrepris autant de changements sur les plans technologiques, tactiques organisationnels et sur ses effectifs que la marine de l'Union. Il est indéniable que sans la marine fédérale la guerre de Sécession n'aurait pu être gagnée par les armées de terre du nord. Elle a permis d'étouffer petit à petit l'économie sudiste par le blocus, prendre le Mississippi et protéger le commerce du nord des attaques de raiders confédérés. elle a remporté la plupart de ses combats navals aidée il est vrai par une supériorité numérique écrasante.

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